La nuit passe

Et la nuit vint,
Sombre, noire, sans lune.
Ouverte sur tous les rêves,
Propice à tous les cauchemars,
Prête à tous les fantasmes.
Froide pour d’uns, hot pour d’autres,
Sous les ponts ou sur le pont,
Couchés sous un carton ou faisant carton plein,
L’estomac plus loin que les talons, ou le ventre gavé, bien plus que rond,
Battant la semelle, se réchauffer, ou battant du pied, boite surchauffée,
Ivre de solitude ou enivré de bar en nectar.

La nuit passe.
Passage vers le jour, vers la vie, vers toi.
Je me tourne, tu es là, tu me souris.
Je te prends.

 

Etourdi que je suis

Se dit l’homme qui franchissait les portes du commissariat.
Il avait perdu son permis de conduire, à moins qu’une bonne âme le lui ait volé…, et il venait en ce lieu de calme et de sérénité, faire le nécessaire pour le faire refaire.
Dans le quartier où il habitait, ce n’était que barres d’immeubles à l’horizon, horizon bouché par ces barres, ce qui limitait leur nombre.
Il sentit sur ses épaules le poids de 5 ou 6 paires d’yeux, qu’il arrivait à traduire sans dictionnaire, ni interprète :
Qu’est qu’il veut celui-là ?
Encore un emmerdeur qui va nous demander où s’arrête le kilomètre autour de chez lui. Ou bien c’est un touriste étranger qui s’est perdu et qui veut savoir où est l’autoroute ? N’existe pas ! Y a pas d’autoroute ! D’ailleurs ta caisse, il faut la dégager, elle gêne…
L’homme hésita. Devait-il aller au comptoir ou s’asseoir sur l’une des deux chaises qui étaient posées là, sans doute pour faire patienter les impatients.
Monsieur, monsieur, que puis-je faire pour vous ?
Une charmante demoiselle lui faisait le plus beau des sourires…
Il se dirigea vers elle non sans montrer à ceux qui le regardaient toujours, le soulagement qu’il ressentait.
Une déclaration de perte ? Pas de problème. Elle expliqua avec détails ce qu’il avait à faire. Il allait repartir tout content de n’avoir passé qu’une grosse dizaine de minutes dans ce lieu accueillant quand il vit devant elle sous le plateau du comptoir, un jeu de carte étalé pour une réussite.
Voyant le regard pris en faute de la belle demoiselle, il engagea la conversation à mi-voix sur le temps passé à attendre que le temps passe
Vous n’imaginez pas le peu de crimes ou de délits qui se produisent, dit-elle, à peine un par semaine, mais il faut être prêt pour le pire.
Comme les pompiers rajouta l’homme.
L’inspecteur sortit de son bureau, l’ait tout aussi occupé que son équipe.
Que nous vaut votre visite cher monsieur ?
J’ai déjà tout raconté à votre collège, suis-je obligé recommencer ?
Mais bien sur mon petit monsieur ! Elle est stagiaire et moi commissaire, vous voyez la différence ? Ou je vous mets aux fers ?
Sans le dire à haute voix, mais en regardant la dénommée stagiaire, il pensa si fort que tout le monde l’entendit :
En tous cas, c’est pas avec toi que je vais coucher ce soir !
Le sourire de la demoiselle montrât qu’il avait été compris …
En rentrant chez lui, il vit son permis de conduire bien en évidence sur l’étagère de l’entrée…
Merci, dit-il.
Le permis ne répondit pas !

 janvier 2021

L’amour vieillit lui aussi

Il était un homme et une femme,
Qui avaient trouvé l’amour,
Et le vivait depuis très longtemps.
Vivre la vie leur a souri,
Pour lui, sa mie, leurs petits et leurs amis.

L’âge emporte tout, même la vie,
La leur s’est elle perdue dans l’inconnu ?
L’amour, en leur jardin, s’est-il trompé de chemin ?
Tant de dilemmes, après tant de je t’aime ?
Pourquoi s’est-il éloigné,
Les laissant abandonnés,
Alors que l’horizon leur tendait la main,
Pour aller ensemble au bout du chemin ?
Peut-il revenir, s’il n’est allé trop loin ?
Pour eux, pour deux, avec lui, droit devant ?

Face à face au quotidien,
Infinie lassitude,
Lancinantes répétitions,
Usure des mots,
Oubli des gestes,
Efforts perdus,
Vaines tentatives…
Faut-il tout changer, sauf l’amour, s’il revient ?
Et toi, l’amour, que peux-tu faire ?
Seras tu là pour l’avenir, s’il existe ?

Retrouver le charme vieilli d’être deux,
Apprendre à se prendre le bras, une cane à la main,
Surprendre la peau de l’un caressant la peau de l’autre,
Infinie tendresse, douces réminiscences,
Piqures oubliées de deux vies fusionnées.

Écouter le temps passé pour entendre celui qui vient,
Vouloir encore et encore, puisqu’il n’y a que la volonté qui vaille,
Vouloir l’amour, jusqu’au bout, jusqu’à nous, jusqu’au jour où…
Meilleurs vœux d’amour

A toi Femme

A toi, fille, pour qui tout est promesse, y compris l’avenir,
A toi, amante, le présent t’est promis, tu peux tout te permettre,
A toi, femme, unique sujet de tant de bonheur et de plaisir,
A toi, épouse, tu donnes la vie et tu en fais un paradis,
A toi, mère, abandonnée par ceux que tu n’abandonneras jamais,
A toi, grand-mère, toute d’attentions, confidente et modèle des tiens,
A toi, vieille compagne, respect, tendresses et tant de choses aussi…
À toi, à vous, et à chacune,
Chaque jour consacré au bonheur familial
Chaque nuit allouée au plaisir conjugal,
Canopée, niche là-haut de vos talents,
Refuge, riche ici-bas, de nos rêves d’antan
Pour toujours… Inaccessibles étoiles.

3 avril 2020

Toi, l’enfant que nous sommes

Écris tes peines sur le sable,
Grave tes joies dans la pierre,
Cache tes peurs dans une armoire fermée,
Et va jeter la clé dans l’océan.

Dessine tes rêves sur un nuage en béton armé, sans serrure,
Qu’il soit ouvert à tous les vents, désarme-le de ses ferrures.

De victoires en défaites, c’est la vie qui va,
De coups gagnants en pertes ‘rien ne va plus’,
Quand elles sont abyssales, tu touches le fond où rouillent des clés d’armoire.

Ne joue pas aux dés, ils ne montent pas jusqu’aux nuages, ils ne savent pas rêver.
Sois debout, la tête au carrefour des vents traversant les nuages,
Ou assis à une table qui joue gagnant si elle participe à tes rêves,
Vise juste, respire et fonce,
Il n’y a que toi qui peux gagner
Si la bataille est tienne…

Un dimanche à la campagne

 

L’hôte de ces lieux est déjà au bout de son râteau,
L’herbe devant son grand âge, se laisse faire, roulée dans un sens, palpée dans l’autre, massée et ramassée, fourchée en bottes, à coup de fourches, à coup de bottes.
Le bruit saccadé d’un sécateur métronome taille la futaie, rabat les ébats du printemps.
Un voisin replace des tuiles sur son toit, il est pressé, le soleil ne lui pardonnera pas qu’il déborde la limite des heures matinales.
L’hôtesse de ce lieu a le plaisir de dire qu’elle aime et apprécie ces dimanches à la campagne, au milieu de sa descendance.
Du fond de l’air, monte le rire des enfants. Sur une chaise allongée, ma plume vagabonde.
Le bruit saccadé d’un sécateur rythme le concert offert par le peuple de l’air qui, pour ne pas s’assommer contre la chaleur montante, ouvre ses ailes à l’astre brûlant et les referme sur l’ombre apaisante.
Le soleil ne pardonne plus, il tape de partout, sans répit ni distinction, sur ce qui bouge, sur ceux qui n’ont rien demandé, sur ma plume déliquescente.
Un coup, deux coups, dix coups, la cloche sursaute du clocher et martèle le tambour de nos tympans. Elle donne le temps qui passe, oubliant son devoir initial d’appeler à l’office dominical.
Le bruit saccadé du sécateur ne saccade plus, remplacé par le silence de l’eau qui s’écoule du bout des mains de celle qui pistole les rosiers.
Le soleil veut régner en maître, seul et sans témoin. La journée sera brûlante, ma plume se résigne.
La compagnie se réfugie sur l’herbe ombragée par la voûte d’un tilleul absorbant la chaleur et distillant la fraîcheur.
Ombre et soleil, duo magique, l’une ne peut se passer de l’autre. Elle, créée par lui, apparaît quand il se montre, disparaît quand il se cache. Plus sa chaleur se précise, plus elle est précieuse.
Elle ne se déplace pas sans lui, elle sait qu’à la fin du jour, c’est elle qui gagnera, toujours !
Dans un ciel sans nuages, d’un bleu plus bleu que le bleu ciel, une trace blanche, moutonnante et immobile, souligne le son d’un avion à réaction, venant de mon enfance et disparaissant au bout de l’horizon.
L’est où l’avion ? Parti !
Emmenant cette journée dans le grand voyage du temps… Restera la trace du souvenir d’un dimanche à la campagne…

 Juin 2018

 

Bel Automne

Enveloppée de brumes et de brouillards,
L’automne prend son vol, tel une feuille morte.

Il s’envole, aux premières gelées, vers les premiers flocons.
Il s’attarde de-ci de-là, dans le creux des bois.

Il caresse le mamelon des collines, habillé de frimas.
Il entend le chant des cors coursant le sanglier.

Il voit l’homme soufflant juste avant l’hallali.
Il vibre au brame du cerf hélant une biche frissonnante.

Il mûrit les grappes de raisin avant la vendange.
Il met à bas les châtaignes jonchant le sol ardéchois.

Il met en feu les couleurs irradiant les forêts.
Il met le feu aux joues des enfants courant et s’attrapant.
Il ouvre l’école, ferme les cols, cravate ceux des chemises.

Rentrons ma mie, l’automne est là, le notre
Glisse toi contre moi, tout contre,
C’est la plus belle saison puisque nous allons la vivre !

octobre 2017

Il était une fois un hérisson

Il était une fois un hérisson qui avait bien envie de découvrir le monde.
Plus le temps passait et plus il en avait envie ;
Un beau matin, il mis des épines de rechange dans son sac à dos et dit à ses parents: “ je pars … là-bas”.
Et il marcha, marcha, marcha, longtemps, longtemps, longtemps…
De nombreux jours étaient passés et il n’avait plus assez d’épines de rechange pour faire demi-tour, alors il continua. Chemin faisant, il rencontra une petite hérissonne, un peu polissonne, qui avait envie de jouer.
Il resta deux ou trois jours pour jouer avec elle, puis continua son chemin.
Et c’est alors … qu’il arriva au bord de la mer !
Il n’avait jamais vu la mer, ni le sable, ni les vagues.
Il avança une patte, puis une autre,et il trouva cela fort drôle.
Le sable roulait sous ses petites pattes,et plus il avançait, plus il s’enfonçait.
Il voulut faire demi-tour. Impossible de bouger. Il s’ébroua et se secoua.
Et …
Il vit la première s’approcher.
Elle vint lui lécher les babines, et repartit.
La seconde vint lui mouiller les oreilles et s’en alla.
La troisième fut encore plus forte. A chaque fois, elles repartaient.
Mais plus les vagues arrivaient et plus elles mettaient du temps pour repartir. Il commença à s’inquiéter. Les vagues faisaient de plus en plus de bruit, étaient de plus en plus fortes et ce qui devait arriver arriva. Une vague plus forte que les autres l’emmena avec elle. Le petit hérisson ne savait pas nager, mais comme tous les hérissons, il hibernait tous les ans et il avait donc la capacité de retenir son souffle, sans respirer … et c’est ce qu’il fit.
Une dernière vague encore plus forte que la précédente le ramena sur la terre et le déposa délicatement au bord de la gréve.

Le petit hérisson était fatigué, laminé, éreinté.
Il creusa un trou dans la terre et s’endormit pour longtemps, longtemps, longtemps. Tout l’hiver passa et le petit hérisson dormait toujours, juste en bordure de la plage.
Il sentit quelque chose bouger à côté de lui et vit la petite hérissonne polissonne. Elle avait autour d’elle une douzaine de bébé.
En regardant mieux, ce n’était pas des hérissons, mais des petites boules pleines de poils noirs qui ressemblaient à des hérissons, mais qui n’étaient pas des hérissons !
Il demanda à la petite hérissonne polissonne si elle connaissait ces animaux qu’il ne connaissait pas. La petite hérissonne polissonne lui répondit que non, elle ne savait pas. Ils étaient déjà là, autour de lui, quand elle arriva pour hiberner avec lui.
Le petit hérisson demanda si elle avait déjà joué avec les vagues ?
C’est quoi les vagues ? Les oursins se mirent à rire ! Comment peut-on ne pas savoir ce que sont les vagues ?
Vexée, la petite hérissonne polissonne leur demanda s’ils avaient déjà grimpés au sommet d’une montagne ?
C’est quoi une montagne ?
Le petit hérisson arrêta cette conversation qui devenait embarrassante. Il prit la tête du groupe et fonça vers la mer où tout le monde le suivit. Ils jouèrent, et jouèrent, et jouèrent, pendant des heures, et des heures, et des heures…

Quand la nuit tomba, elle vit ce que le jour avait essayé de dissimuler.
Les oursins jouaient entre eux tandis que les hérissons jouaient à deux.
La nuit les disputa ! Il y a des jeux pour le jour, que l’on joue tous ensemble, et d’autres pour la nuit, qui se jouent séparément …
La nuit demanda au petit hérisson et à la petite hérissonne s’ils étaient prêts pour aller à confesse ou si ils étaient de ceux qu’on fesse !
Ni l’un, ni l’autre, dirent-ils en choeur. Nous allons nous marier et nous aurons beaucoup d’enfants qui joueront avec les vagues, avec les oursins, avec le jour, avec la nuit, et qui saurons aussi grimper aux sommets des montagnes

Moralité : Il faut quitter son père et sa mère pour trouver son âme soeur et polissonne, découvrir les autres et la richesse de leurs jeux et s’apercevoir que le monde n’est beau que s’il est éclairé tantôt par le jour, tantôt par la nuit, en ajoutant nos qualités plutôt qu’en retranchant nos différences.

Avec des si

Si j’étais Femme, je me promènerais sur les grands boulevards, en mini-jupes et talons aiguilles, et je changerais de mecs en fonction de la météo du jour.

Mais je suis Homme, je vis en open space, répondant aux appels de ceux qui entrent dans mes oreilles, ignorant les appels de cils de celles qui m’entourent.

Si j’étais jeune, je me promènerais autour de la Terre, en jeans et baskets, un sac à dos en bandoulière, et je découvrirais la beauté des choses de ce monde.

Mais je suis vieux, je regarde des fous vivre sur l’écran plat de mon poste de télévision :
Des fous d’Allah tirent sur des fous du roi…
Des hélicoptères se télescopent dans un jeu de fou pour la téléréalité…
Nos montagnes sont arpentées par ceux qui cherchent de l’ADN mis en miettes par un fou solitaire.

Si j’étais riche, je me promènerais sur la Promenade des Anglais, en Ferrari et costume chic, je claquerais mes euros au Casino de Monte-Carlo et je rejoindrais mon yacht amarré… à mes pieds, comme le serait tout Monaco.

Mais je suis pauvre, je compte mes euros un par un pour manger, moi et les miens, et je payerais mon loyer s’il est décidé que mon CDD se succédera à lui-même…

Si j’étais heureux, je me promènerais autour de toi, ton cœur autour de mon cou, et je partagerais ton sourire, ma bonne humeur et notre bonheur, avec les autres, quels que soient leurs pays, leurs religions et la couleur de leurs peaux.
Mais je suis malheureux, je ne perçois ni sourire, ni bonne humeur, ni bonheur.

M’as-tu dit que tu m’aimais ?
Je n’ai rien vu, rien entendu.
Les yeux clos sur la fureur des hommes,
Les oreilles sourdes au vacarme du monde.
Réveille-moi, mon Amour.
Serre-moi fort.
Seuls tes bras ouverts peuvent m’ouvrir
au bonheur de vivre.

Mars 2015

La mer et la montagne

La mer claque ses vagues
La montagne claque ces dents

Dent du Midi,
Vagues du soir

La mer lève le jour
La mer couche le soleil

La mer bouge la vie
Les monts gardent la nuit

La montagne nous fait de l’ombre
D’elle, source vers la mer.

5 juin 2012